[Lentilleres-diffusion] "Priorité au logement !" : pour 500 000 euros, la mairie saccage une maison vide aux Lentillères.

Le Jardin des Maraîchers jardindesmaraichers at potager.org
Jeu 4 Sep 15:56:09 CEST 2014


"Priorité au logement !" [1]: pour 500 000 euros, la mairie saccage une
maison vide aux Lentillères.


Voir : http://jardindesmaraichers.potager.org/?p=704

En ce lundi matin du 1er septembre, nous nous sommes réuni-e-s à une
bonne trentaine pour prendre le petit-déjeuner dès 7h30 devant la maison
du 10 rue Amiral Pierre, dans le quartier libre des Lentillères.

Alerté-e-s par la présence d'un tractopelle devant la batisse depuis
quelques jours, nous refusions de le voir venir détruire des murs qui
pourraient regorger d'âmes et de vies. Vide depuis plusieurs mois après
avoir été loué à l'équipe locale de Hockey sur Glace, la demeure
appartient à la mairie et aucun projet n'y est prévu avant 2018. Elle
avait été rachetée 5 ans auparavant pour 500 000 euros. Depuis le départ
des sportifs, une société de sécurité privée venait régulièrement
vérifier que personne ne venait s'installer là. Visiblement, cela
n'était pas suffisant puisque l'entreprise Vigot fut commanditée pour
détruire la maison.

Café, croissants, thé sont là pour accueillir les ouvriers ce lundi
matin. Pris de court, ils sont d'abord agacés en constatant que les
vitres de leur grosse machine avaient été précédément décorée de
couleurs plus chatoyantes que celles d'origine. Qu'à cela ne tienne, ils
démontent eux-mêmes une partie du matériel et commencent à faire bouger
les grandes dents du tractopelle. Au bout de quelques secondes, diverses
personnes montent sur le bras de l'engin, qui provoque une réaction
bienheureuse à l'occupant de la cabine : s'arrêter, boire un café,
discuter. Peut-être que le désir de briser des murs qui pourraient
servir ne l'habite finalement pas tant que ça. Son collègue, par contre,
part se défouler avec un pied de biche, histoire de démonter l'intérieur
de la maison, à la main, à l'ancienne. Au même moment, un camion-benne
déplacé pour emporter les gravats est stoppé par quelques poubelles en
travers de la route un peu plus bas dans la rue.

Puis, c'est le bal des arrivées.
Tout d'abord, la patronne de l'entreprise se pointe, nous livre quelques
banalités sur le fait qu'il faut bien travailler pour vivre et qu'elle
exécute une commande. Elle ordonne à ses ouvriers de continuer la
destruction de la maison tandis que des gens sont montés sur la pelle ;
ceux-ci s'arrêtent, fort heureusement, pour ne pas risquer de blesser
gravement quelqu'un.
Ensuite, un policier en civil armé de son talkie. Pour l'anecdote,
moment d'inquiétude quand il s'aperçoit que ses larbins tentant de
monter dans les appartements de l'immeuble voisin pour nous prendre en
photo se sont faits mettre dehors par une dame du quartier. On voit
aussi passer l'adjoint à la tranquillité publique de la mairie de Dijon,
venu constater que le chantier était bel et bien bloqué.
Enfin, vers 11h30 l'armada policière en tenue anti-émeutes, gazeuses et
matraques à la main. Quelques rapides échauffourés plus tard, nous nous
retrouvons avec un blessé, la cheville enflée suite à un coup de
matraque. Mais fort heureusement, la pelleteuse s'était arrêtée juste
avant la charge après seulement quelques minutes de fonctionnement.
Après inspection, le conducteur semble découvrir que le réservoir avait
été saboté ! Les flics sont ensuite restés sur place pour garder tout
ça. Ensuite, la machine remise en route après quelques réparations n'a
laissé au soir qu'un maigre pan de mur.

Dans la presse locale, la Mairie justifie la destruction de la maison en
avançant qu'il y aurait présence d'amiante... Excuse opportune
puisqu'elle la louait depuis plusieurs années aux Hockeyeurs
professionnels locaux. Ce matin les ouvriers de l'entreprise Vigot
n'avaient de toute façon ni équipement adapté, ni consigne de
destruction particulière. Par ailleurs la Mairie ne disposait même pas
d'un permis de démolir.

Pour rappel, en 2010, la municipalité avait fait expulser les
occupant-e-s d'une villa, puis démoli cette grande maison, qu'elle
venait de racheter - elle aussi - pour 500 000 euros. Deux ans plus
tard, elle venait creuser des trous béants pour empêcher l'installation
d'une ferme maraîchère. Depuis, le jardin des maraîchers [2] et un parc
de quartier, accueillant amphitéâtre, bâteau-pirate et terrain de
pétanque ont remplacé ces saccages municipaux. En 2013, la mairie
mettait 150 demandeur-se-s d'asile à la rue en expulsant un grand
bâtiment rue Bertillon. Depuis, celles et ceux-ci ont réinvesti l'ancien
pôle emploi situé rue René Coty.

La municipalité a montré ce matin une fois de plus qu'elle ne veut
laisser aucune place à la vie de quartier - jardins, habitats, marchés
et autres activités - qui se développe depuis plusieurs années sur les
Lentillères. Au-delà et partout à Dijon, nous nous opposons aux
politiques d'urbanisme en cours, ainsi qu'aux expulsions des précaires
et maisons vides. Pour résoudre les problèmes de logement accessible à
tous et toutes, nous rappelons qu'il y a plusieurs milliers de logements
laissés vides dans l'agglomération dijonnaise. Cette idée a en tout cas
traversé l'esprit de nombreux voisin-e-s rencontrés devant les ruines de
la maison au cours de cette journée.

Des habitant-e-s et jardinier-e-s des Lentillères


[1] Alain Millot, dans une interview au Bien Public (01/09)  :
http://www.bienpublic.com/edition-dijon-ville/2014/09/01/alain-millot-un-maire-qui-joue-la-proximite-avec-les-dijonnais
[2] http://jardinsdesmaraichers.potager.org







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