Les mouvements mondiaux pour la justice convergent sur un sol révolutionnaire
by La Vía Campesina
LES MOUVEMENTS MONDIAUX POUR LA JUSTICE CONVERGENT SUR UN SOL
RÉVOLUTIONNAIRE [1]
Une vive tension collective régnait lors de l'ouverture du Forum social
mondial le 24 mars à Tunis, cinq ans à peine, après qu'une révolution
pacifique, ayant allumé le flambeau des Printemps arabes qui brule
encore aujourd'hui, ait réussi à faire plier une dictature soutenue
depuis longtemps par des puissances politiques occidentales et moins
d'une semaine après que des tireurs aient pris d'assaut le musée du
Bardo et tué 22 personnes, mettant à l'épreuve la détermination d'une
démocratie naissante.
Des dizaines de milliers de délégués venant du monde entier ont convergé
vers Tunis, dans le but de, non seulement soutenir la souveraineté
tunisienne, mais aussi partager leurs luttes et leurs solutions locales
dans un effort de changement et de lutte contre ces injustices
systémiques interconnectées. La manifestation d'ouverture illustrait la
diversité des secteurs sociaux : des groupes d'étudiants tunisiens
côtoyaient des syndicalistes d'Amérique latine et des paysans d'Afrique
subsaharienne, unis par les crises alimentaire, climatique, énergétique
et financière continues.
Au sein de cette foule vibrante d'acteurs sociaux, il n'est pas
inattendu de trouver La Via Campesina, le mouvement social le plus grand
du monde - et sans aucun doute le mieux organisé - avec des délégations
venant des cinq continents. « C'est à nous d'agir, » dit Elizabeth
Mpotu, paysanne du Zimbabwe et coordinatrice internationale des 250
millions de paysans, éleveurs nomades et peuples autochtones qui forment
La Via Campesina. « Nous savons bien que nous sommes pauvres, mais nous
sommes aussi très intelligents et nous savons ce que nous voulons, »
ajoute-t-elle.
La Via Campesina a fait preuve de grande intelligence politique, en de
nombreuses occasions, articulant exactement ce que le mouvement veut,
spécialement en confrontation directe avec la tétrade de crises
actuelles. En 1996, le mouvement a mis en lumière la « souveraineté
alimentaire », mettant au défi les multinationales qui contrôlent
l'agriculture et plaçant l'accès à l'alimentation exactement où il se
doit : aux mains des paysans producteurs. Après quelques années
d'obscurité relative, ce concept de la souveraineté alimentaire a réussi
à pénétrer dans divers espaces politiques internationaux ainsi que
nationaux et locaux.
Les représentants et les alliés de La Via Campesina ont toujours pris
soin de relier la faim et le pouvoir des systèmes alimentaires mondiaux
à la gouvernance des ressources naturelles principalement foncières et
hydriques. La propriété foncière du paysan est menacée par toute une
gamme d'initiatives de développement : les zones économiques spéciales,
les industries extractives, les monocultures agricoles pour
l'exportation. Ces transferts de ressources à grande échelle sont
considérés comme des accaparements de terre contribuant à une ruée
mondiale sur la terre qui dépossède en masse les peuples marginalisés de
leur territoire.
« Au Mali, nous avons constaté une attaque de front sur nos terres, »
dit Massa Kone, dirigeant de la Convergence malienne contre les
accaparements de terres (CMAT), une alliance de plus en plus nombreuse
qui inclut des organisations importantes membres de La Via Campesina.
Kone explique que, dans son pays d'Afrique de l'Ouest, agropastoral par
excellence, 87% de la population se consacre à la production
alimentaire. Les accaparements de terre pour l'agriculture industrielle
menacent ces moyens d'existence au quotidien, quand le gouvernement
malien, insolvable, offre des baux de 99 ans et d'autres incitations
alléchantes aux entreprises multinationales.
Mais la CMAT contre-attaque. « Nous avons obligé notre gouvernement à
nous écouter, et nous sommes maintenant un acteur-clé dans le foncier au
Mali, » déclare Kone « Notre convergence travaille à l'élaboration d'une
nouvelle loi foncière et les paysans dirigent le processus »
explique-t-il avec enthousiasme.
La CMAT fait partie d'une alliance de mouvements sociaux africains plus
étendue qui a composé la Déclaration de Dakar contre les accaparements
de l'eau et des terres en octobre 2014, pendant le Forum social africain
au Sénégal. Cette déclaration, dans sa forte dénonciation des
accaparements de terre et d'eau par les multinationales et les états, a
ouvert la voie à une convergence mondiale des luttes dont le besoin se
fait ressentir de façon urgente - et qui alimente les débats du Forum
social mondial maintenant.
Continuant dans cette voie, La Via Campesina et un groupe d'alliés
stratégiques ont organisé une convergence mondiale de trois jours sur
les luttes foncières et hydriques à Tunis, avec des récits de témoins
directs de violations des droits aux ressources venant de différentes
parties du globe ainsi qu'une introduction à des outils allant de
pratiques d'organisation sur le terrain, à des mécanismes de droits
humains et de gouvernance internationale, visant à répondre à ces
revendications foncières ou hydriques. C'était également un espace vital
à partir duquel des stratégies ou des actions coordonnées d'unité
pouvaient être élaborées face à l'adversité.
Ce processus organique et participatif a culminé dans une nouvelle
déclaration qui souligne le caractère urgent des accaparements fonciers
et hydriques ainsi que les engagements à l'action et à des tâches
politiques spécifiques. Et peut-être plus important encore, dans ces
débuts d'élargissement de la convergence, les auteurs de la Déclaration
de Dakar ont apporté cette initiative à Tunis dans le but d'inviter les
alliés mondiaux à débattre et à ajouter leurs idées et leurs
revendications au document original - et ce faisant créer le pouvoir
nécessaire à l'arrêt des accaparements de terre et d'eau.
De surcroit, à Tunis, de fortes connexions politiques ont été forgées
entre les différentes convergences et pas uniquement dans les processus
fonciers et hydriques. Des militants expérimentés ont organisé une
convergence sur le climat afin de mettre en relief les approches
disproportionnées à la crise climatique qui laissent de côté les
communautés marginalisées dans les pays du sud alors que les
gouvernements riches et les grandes entreprises accélèrent leur
pollution. Les délégations de Tunis ont également organisé une
convergence mondiale sur la résistance au pouvoir des entreprises,
illustrée par une série d'ateliers de campagne stratégique montrant
comment élaborer des initiatives au libre-échange, en plaçant les
populations et la planète avant les profits. La Via Campesina a
coorganisé chacun de ces processus.
Une nouvelle détermination est née de ces espaces lors de la convergence
finale de ces convergences, où des militants organisateurs des
convergences sur l'eau, la terre, le climat, la résistance aux pouvoir
des entreprises ont pu identifier les fautes systémiques sous-jacentes
aux crises alimentaire, climatique, énergétique et financière.
Une fenêtre a également été ouverte pour faciliter une action concertée
lors de rassemblements politiques mondiaux futurs tel que la COP 21 à
Paris. « Nous avons besoin de ces conversations afin de maintenir le
monde en ordre, » a pensé Carlos Morantes, dirigeant de La Via Campesina
et organisateur des travailleurs ruraux à la frontière du Mexique avec
les États-Unis.
Alors que le Forum social mondial se terminait, le 28 mars, avec une
autre manifestation dans le centre de Tunis, beaucoup entonnait le
slogan fondateur : un autre monde est possible. Et faisant écho à
l'esprit de révolution qui a fait trembler les fondations de ce petit
pays nord-africain, il y a peu de temps, les militants ont montré une
grande détermination dans la construction de leur futur - quelques
soient les difficultés de ce processus.
Salena Tramel
_Cet article a été publié en premier lieu par Huffingtonpost le
04/06/2015_
--
Links:
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[1]
http://viacampesina.org/fr/index.php/actions-et-nements-mainmenu-26/forum...
9 years, 8 months
Les paysans du monde entier se mobilisent contre les traités de libre-échange
by La Vía Campesina
17 avril : les paysans du monde entier se mobilisent pour la
souveraineté alimentaire et contre les traités de libre-échange [1]
COMMUNIQUÉ DE PRESSE – LA VIA CAMPESINA
(Harare, Zimbabwe, 17 avril 2015) Aujourd'hui, des milliers de paysannes
et paysans membres du mouvement international La Via Campesina se
mobilisent de par le monde contre les multinationales et les traités de
libre-échange. Ceux-ci touchent durement les petits paysans et leur
agriculture, ainsi que la souveraineté alimentaire. Depuis 1996, La Via
Campesina et ses alliés célèbrent le 17 avril comme étant la journée
internationale des luttes paysannes(1).
Les traités de libre-échange sont au service des multinationales et de
leur mode de production capitaliste et industriel qui dépend lourdement
des intrants agrochimiques. Ils entraînent des vagues de déplacement,
d'expulsion et de disparition des paysannes et des paysans. Les traités
de libre-échange font du profit leur priorité absolue au détriment de
tout droit et de toute autre préoccupation. Un important traité de
libre-échange est actuellement en cours de négociation entre l'Union
européenne, les Etats-Unis et le Canada. Ces discussions, si elles
aboutissent, auront pour effet de libéraliser les échanges commerciaux
et les investissements en faveur des multinationales (voir les vidéos
[2]).
A travers de centaines d'actions locales et globales (voir la carte [3]
régulièrement mise à jour), La Via Campesina rappelle l'importance des
luttes locales et, par la même occasion, souligne le besoin d'une
alliance entre les communautés urbaines et rurales. Parmi les actions
qui auront lieu jusqu'à la fin du mois, citons des occupations de
terres, des échanges de semences, des manifestations, des séances de
promotion de la souveraineté alimentaire, des événements culturels, des
actions directes et des débats. Cette année, en Europe, notamment en
Allemagne, en Suisse et en Belgique, des manifestations sont organisées
contre le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement
(Transatlantic Trade and Investment Partnership - TTIP), l'Accord
économique et commercial global (AECG, ou en anglais Comprehensive Trade
and Economic Agreement - CETA) et l'Accord sur le commerce des services
(ACS, ou en anglais Trade in Services Agreement - TiSA). En Asie, au
Japon et en Corée du Sud, un important rassemblement est prévu pour
forcer le gouvernement japonais à refuser les négociations de l'Accord
de partenariat transpacifique (Trans-Pacific Partnership - TTP). En
Amérique du Sud, une grande marche rassemblant plus 1 500 personnes
venant du monde entier se déroulera en Argentine pendant le congrès de
la CLOC-Via Campesina (Coordination des organisations paysannes
d'Amérique latine) à Buenos Aires.
La Via Campesina a pour objectif de dénoncer les lois et les forces qui
affectent la vie paysanne, un précieux héritage des peuples au service
de l'humanité. Le mouvement fait la promotion de la souveraineté
alimentaire afin d'éradiquer la faim dans le monde et d'instaurer la
justice sociale.
Face à ce sombre tableau où le libre-échange et les profits juteux
dominent, La Via Campesina propose une économie fondée sur l'équité qui
rééquilibrerait les rapports entre l'homme et la nature. La réforme
agraire et l'agriculture durable sont au centre de ce mode de vie fondé
sur la souveraineté alimentaire des peuples.
PORTE-PAROLES POUR LA PRESSE:
Ndiakhate Fall, CNCR, Sénégal (en français): + 221 77 550 89 07
Marina dos Santos, MST, Brésil (en espagnol et portugais): +54
9261571785
Yudhvir Singh, BKU, Inde (en anglais): +54 926115717585
* Faites connaître vos actions en nous envoyant des informations
relatives aux événements prévus à l'adresse suivante:
lvcweb(a)viacampesina.org
* Faites-nous également parvenir vos article, photos, vidéos, posters,
des tracts, etc. Nous publierons en ligne et sur la carte reprenant
toutes les actions prévues sur www.viacampesina.org [4]
>> (1) ORIGINE DE CETTE JOURNÉE MONDIALE: Le 17 avril 1996, au Brésil, la police militaire a assassiné 19 paysans à Eldorado dos Carajás, dans l'état de Pará. Ces paysans étaient membres du Mouvement des paysans sans terre (MST). Ce jour-là, 1500 hommes et femmes bloquaient l'accès à l'autoroute BR-150 à Eldorado dos Carajás avec pour objectif de forcer l'État et le gouvernement fédéral à entamer une réforme agraire. Vers 16h, 155 hommes de la police militaire de l'État ont encerclé les manifestants du MST, ils ont ouvert le feu et ont fait usage de gaz lacrymogènes contre eux. Au bilan des 19 personnes tuées sur place, 3 personnes sont mortes des suites de leurs blessures et 69 autres ont été blessés. Les autorités étatiques, la police, l'armée et les propriétaires terriens sont responsables de l'organisation et de l'exécution de ce massacre.
Links:
------
[1]
http://viacampesina.org/fr/index.php/actions-et-nements-mainmenu-26/17-av...
[2]
http://tv.viacampesina.org/17-Avril-Journee-internationale-498?lang=fr
[3] http://www.viacampesina.org/map/17april/2015/
[4] http://www.viacampesina.org/
9 years, 8 months
La Via Campesina exprime de vives inquiétudes quant à la situation au camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk
by La Vía Campesina
La Via Campesina exprime de vives inquiétudes quant à la situation au
camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk [1]
Créé le jeudi 9 avril 2015 15:57
COMMUNIQUÉ DE LA VIA CAMPESINA, 8 AVRIL 2015
_La Via Campesina exprime de vives inquiétudes quant à la situation au
camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, dans le Sud de Damas._
La Via Campesina suit avec une extrême attention les rapports récents
sur l'invasion du camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk par des
forces extrémistes armées. Nous sommes extrêmement inquiets de la
situation de nos amis et partenaires de projets pour la souveraineté
alimentaire qui sont sur place, et qui sont pris pour cible par les
forces armées. La récente exécution du militant de la société civile
Firas El Naji est un exemple de la gravité de la situation à laquelle la
société civile doit faire face ; Firas El Naji était l'un des fondateurs
des projets visant à mettre en place la souveraineté alimentaire à
Yarmouk, dans le but de réduire les souffrances d'une population victime
de la malnutrition causée par l'état de siège. Nous sommes aussi
particulièrement inquiets pour la sécurité d'Abdullah Al Khateeb ainsi
que d'autres défenseurs locaux des droits de l'Homme visés par les
groupes armés. La menace pesant sur ces membres actifs de la société
civile est immense, et nous ne voulons pas rester silencieux pendant que
ces derniers et leur communauté sont ciblés.
En tant que réfugiés Palestiniens - considérés comme citoyens apatrides
par de nombreuses nations - ils ne bénéficient d'aucune des protections
qui leur reviendraient de plein droit dans leurs différents pays
d'accueil. Les réfugiés Palestiniens en Syrie, de nouveau déplacés, ont
vu leurs droits en tant qu'apatrides se détériorer plus fortement
encore.
Dans le cas de Yarmouk, situé dans la banlieue Sud de la capitale
Syrienne, l'organe des Nations Unies qui a pour mission de fournir et de
maintenir les services de base à la communauté palestinienne, l'UNWRA,
n'a pas été capable de remplir ses obligations fondamentales auprès des
résidents Palestiniens du camp. Ceci est le cas depuis presque deux ans,
c'est-à-dire depuis que le camp est en état de siège. Pendant toute
cette période, la totalité de la population de la zone - pas seulement
les Palestiniens- a été isolée et laissée sans assistance de la part de
la communauté internationale.
Pendant ces deux années de siège, tout mouvement de population a été
interdit, ainsi que la provision de nourriture ou l'accès aux soins
médicaux. En septembre 2014, l'approvisionnement en eau a été coupé,
aggravant encore la situation. Les 18 000 habitants qui restent encore
dans le camp se trouvent dans une situation humanitaire désespérée. Ce
siège est complètement illégal au regard du droit humanitaire
international et doit être considéré comme un crime de guerre.
En tant que mouvement paysan et mouvement pour la défense de la
souveraineté alimentaire, c'est avec les plus vives inquiétudes que nous
constatons les violations continues des droits des Syriens qui, dans de
nombreuses régions du pays, sont victimes de stratégies criminelles
telles que "la famine ou la capitulation". Avec près de 200 morts
victimes de malnutrition, Yarmouk est l'un des exemples le plus flagrant
de ces méthodes visant à détruire des communautés entières. Nous
dénonçons l'utilisation de la faim comme une arme contre les
populations, par toutes forces armées.
A la lumière des nouveaux développements dans le camp de Yarmouk, avec
l'invasion par « l'Etat Islamique » et les violences commises contre les
résidents, la situation humanitaire s'est encore plus dégradée, nous
appelons la communauté internationale et spécialement l'UNWRA à faire
tout ce qui est en leur pouvoir pour protéger la population de Yarmouk.
En urgence, nous demandons:
* Un passage sécurisé pour tous les habitants de Yarmouk, afin qu'ils
puissent entrer et sortir du camp, sans risque d'arrestation par les
forces armées en place ;
* Une protection totale pour ceux qui souhaitent quitter le pays,
protection qui inclue le droit au départ et l'ouverture des frontières
des autres États ;
* Que l'UNWRA approvisionne immédiatement les résidents assiégés de
Yarmouk en nourriture, eau et aide médicale ;
* Que toutes les parties palestiniennes s'engagent collectivement à
défendre les droits des populations assiégées en Syrie et aux alentours
;
* Que le Comité International de la Croix Rouge soutienne
l'approvisionnement médical et alimentaire de tous les résidents de la
zone, remettent les hôpitaux détruits par l'état de siège en état de
fonctionner et assure un passage sécurisé.
Organisez des manifestations de solidarité avec la population de
Yarmouk, dans vos villes et demandez à ce que la communauté
internationale, l'UNWRA et le Comité International de la Croix Rouge
utilisent leurs mandats internationaux pour protéger les habitants du
camp de Yarmouk.
Veuillez écrire :
- à l'UNWRA, allez sur http://www.unrwa.org/contact [2]
- au Comité International de la Croix Rouge: Fax: +41 22 733 20 57, ou
allez surhttps://www.icrc.org/eng/who-we-are/contacts/index.jsp [3]
Télécharger le PDF de presse ici [4]
Links:
------
[1]
http://viacampesina.org/fr/index.php/les-grands-ths-mainmenu-27/droits-hu...
[2] http://www.unrwa.org/contact
[3] https://www.icrc.org/eng/who-we-are/contacts/index.jsp
[4]
http://viacampesina.org/fr/images/stories/pdf/2015-04-07%20Communiqu%20Ya...
9 years, 9 months
Nouvelle publication - Les lois semencières qui criminalisent les paysans : résistance et luttes
by La Vía Campesina
NOUVELLE PUBLICATION - LES LOIS SEMENCIÈRES QUI CRIMINALISENT LES
PAYSANS : RÉSISTANCE ET LUTTES [1]
LA VIA CAMPESINA | GRAIN
Communiqué de presse
- 8 avril 2015
POUR PUBLICATION IMMÉDIATE
Les semences paysannes, base de la production alimentaire, sont
attaquées de toutes parts. Dans de nombreux pays, les lois votées sous
pression des grandes entreprises limitent de plus en plus l'utilisation
que les paysans peuvent faire de leurs semences. La conservation et la
réutilisation des semences, une pratique millénaire à base de
l'agriculture, est ainsi rapidement devenue une pratique criminelle.
Il faut agir ! Un NOUVEAU LIVRET [2] et unPOSTER [3] édités par La Via
Campesina et GRAIN exposent la façon dont les multinationales et les
gouvernements s'y prennent pour freiner l'échange et la protection des
semences par les paysans ; mais ces derniers ne se laissent pas faire.
Selon Guy Kastler de La Via Campesina : « Le contrôle des semences doit
se trouver entre les mains des paysans et des paysannes. C'est ce
principe, base même des procédés de production, qui assure la
souveraineté alimentaire des communautés rurales et des populations
urbaines face aux multinationales et leurs énormes profits. Au cours des
siècles, les paysans ont trié et sélectionné des milliers de variétés de
semences qui ont fait le chemin jusqu'à notre époque et se retrouvent
maintenant à la base des régimes alimentaires du monde entier ».
Il se fait que, aux yeux des multinationales qui cherchent à imposer des
lois leur offrant le contrôle sans condition des terres, de
l'agriculture, des denrées alimentaires et des profits qui peuvent être
réalisés dans ce secteur, ces pratiques semencières ancestrales sont un
obstacle de taille. Pour La Via Campesina, les lois doivent au contraire
garantir les droits des paysans de conserver, d'utiliser, d'échanger, de
vendre leurs semences et les protéger de la biopiraterie.
« Avec le soutien des gouvernements, les grandes entreprises mènent
l'offensive sur le plan juridique, pour prendre le contrôle des
semences. Elles se permettent non seulement de privatiser les semences
grâce à de nouvelles lois, mais s'accordent également de nouveaux droits
pour pouvoir entrer de force chez les paysans et détruire leurs semences
» , explique Camila Montecinos de GRAIN.
Les lois qui concernent les semences évoluent et s'endurcissent en
réponse aux désidératas de l'industrie biotechnologique et semencière.
Les soi-disant « accords de libre-échange », les traités
d'investissements bilatéraux et les initiatives d'intégration régionales
renforcent l'impact des autres droits de propriétés sur les semences en
apparence moins contraignant.
Ce qui est en jeu ici, ce sont les fondements de l'agriculture paysanne,
ni plus ni moins. Dans le monde entier, des mouvements sociaux, et
surtout des associations de paysannes et de paysans, se sont levés et se
sont mobilisés pour empêcher le vote de telles lois.
Les multinationales et les gouvernements comptent sur la confidentialité
et le manque de transparence, car ils savent que des citoyens bien
informés rejetteraient l'idée de la privatisation des semences.
Ce livret a pour objectif de renforcer la résistance en permettant au
plus grand nombre, et tout particulièrement aux communautés rurales les
plus touchées par cette problématique, de comprendre ces lois de
l'industrie, leurs objectifs et leurs impacts. Il entend aussi insister
sur le rôle que jouent les mouvements sociaux pour faire voter des lois
qui, au contraire, protègent les droits des paysans : leur succès est
une condition incontournable de la souveraineté alimentaire et par
conséquence de la souveraineté politique des peuples.
TABLE DES MATIÈRES
1. Comment les législations semencières convertissent les semences
paysannes en semences illégales
2. Afrique : un trésor menacé
3. Les Amériques : la résistance massive contre les lois Monsanto
4. Asie : la lutte contre une nouvelle vague de semences industrielles
5. Europe : les paysans s'efforcent de sauver la diversité agricole
CONTACTS
LA VIA CAMPESINA
Guy Kastler (français) +33 46 891 2895
Andrea Ferante (anglais, espagnol) +39 348 018 9221
GRAIN
Renée Vellvé (anglais, français) +33 67 507 3468
Camila Montecinos (espagnol) +56 22 222 4437
_______
AVIS AUX ÉDITEURS
Ce livret est accompagné
* d'un poster exposant les différentes actions que les paysannes, les
paysans et leurs alliés peuvent entreprendre pour défendre leurs
semences [3] (illustration par Julia Yellow )
* d'un tableau décrivant les diverses lois semencières à travers le
monde [4]
Links:
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[1]
http://www.viacampesina.org/fr/index.php/les-grands-ths-mainmenu-27/biodi...
[2]
http://viacampesina.org/fr/images/stories/pdf/lvc-grain-semencieres-qui-c...
[3]
http://www.viacampesina.org/fr/images/stories/pdf/Seed%20laws%20poster%20...
[4] http://www.grain.org/attachments/3395/download
9 years, 9 months
Déclaration de la Convergence Globale des luttes pour la terre et l’eau
by La Vía Campesina
Déclaration de la Convergence Globale des luttes pour la terre et l'eau
[1]
Créé le samedi 4 avril 2015 13:50
DROITS À L'EAU ET À LA TERRE, UNE LUTTE COMMUNE
_Dakar à Tunis : Déclaration de la Convergence Globale des luttes pour
la terre et l'eau (Tunis, le 28 mars 2015)_
Nous, mouvements sociaux et de bases et organisations de la société
civile, engagés dans la défense des droits à la terre et à l'eau, nous
nous sommes réunis à Dakar en octobre 2014 dans le cadre du Forum Social
Africain pour lutter et protester contre les accaparements de toutes les
ressources naturelles, l'eau et la terre, nos biens communs, et contre
les violations systématiques des droits humains qui les accompagnent. Le
partage de nos idées nous a amenés à reconnaître la solidarité
essentielle de nos combats, étant donné la nature inextricable des liens
entre l'accaparement des terres, de l'eau et des autres ressources
naturelles. Nous nous sommes réuni-e-s de nouveau lors du Forum Social
Mondial à Tunis en mars 2015 pour continuer ce dialogue avec des
mouvements et organisations du monde entier afin d'élargir cette
convergence.
Aujourd'hui, plus de 200 millions d'hectares de terres sont accaparées
dans le monde entier par des entreprises, gouvernements, élites,
spéculateurs, souvent soutenus par la Banque mondiale, le Fond Monétaire
International (FMI), le G8 et d'autres institutions et consortiums.
Cette mainmise par une minorité sur nos biens communs engendre
concentration, expulsion puis asservissement des populations. Cela se
fait au nom de la protection de l'environnement, sous prétexte d'arrêter
le changement climatique, la production d'énergie « propre », des
méga-projets d'infrastructures et/ou au nom du soi-disant développement,
souvent promus par des partenariats public-privé tels que la Nouvelle
Alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition en Afrique. Des
territoires entiers sont ainsi vidés de leurs communautés, tandis que la
perte d'identité et la destruction des écosystèmes rendent la vie
impossible. Les communautés, dont les droits et la dignité ont été
bafoués, se retrouvent avec des familles déstructurées ou transformées
en communautés de réfugiés, forcées à migrer, sans droits, appauvries,
affamées. Il est estimé que 3000 personnes meurent chaque jour par
manque d'eau. L'accès et la gestion des espaces de vie communautaire
sont détruits par des groupes militaires et armés qui perpétuent la
guerre et l'occupation, des forces de l'ordre des États criminels,
soutenus par des élites économiques, financières et politiques. Cela
mine les systèmes d'alimentation locaux et un grand nombre de
producteurs locaux qui nourrissent en réalité la vaste majorité de la
population mondiale. Quand les gens résistent, ils sont criminalisés,
emprisonnés et assassinés.
Ainsi, les profits faramineux d'une élite sont bâtis sur la violation
systématique des droits humains de la majorité de paysan-nes,
habitant-es de quartiers populaires ou informels, pêcheurs, communautés
d'éleveurs et nomades, les peuples et communautés indigènes,
travailleur/euses ruraux et urbains et consommateurs et consommatrices,
particulièrement les jeunes et les femmes, qui sont expropriés de leurs
terres et moyens de subsistance par la violence, l'intimidation et les
tortures. L'accaparement des terres s'accompagne toujours de
l'accaparement de l'eau par différents moyens : les cultures
non-durables consommatrices d'eau, la privatisation des services de
distribution et gestion des eaux (qui volent cette ressource vitale de
ceux qui ne peuvent pas la payer), la contamination des nappes par des
exploitations minières incontrôlées, la modification de cours fluviaux
et du flux d'eau par la construction de barrages et l'expulsion des
communautés qui en résulte, la militarisation des points d'accès à l'eau
et des territoires, l'expulsion des éleveurs et des pêcheurs de leur
milieu de vie, par exemple à travers des pratiques comme l'extraction de
sable sur les côtes.
La criminalisation des militant-e-s qui se battent pour la protection
des biens communs est aujourd'hui un phénomène courant, quoique caché
par les autorités. Car la terre et l'eau sont des ressources de plus en
plus rares, et par conséquent cruciales pour la sécurité des sociétés et
la souveraineté des États aujourd'hui et demain! Or, cette organisation
de la rareté qui est à la base des crises hydrique, foncière et
alimentaire n'est pas une donnée naturelle, elle est construite par des
enjeux politiques, géostratégiques et financiers.
En réponse à ces menaces à nos vies et notre bien-être, nous résistons
et luttons. Nous faisons valoir nos droits et présentons des vraies
solutions. Nous croyons que le contrôle et l'accès des peuples à la
terre et l'eau sont essentiels pour la paix, pour arrêter le changement
climatique et pour garantir les droits humains fondamentaux et une vie
digne pour toutes et tous. La distribution juste et équitable de la
terre et de l'eau, et l'égalité des genres sont essentielles pour notre
vision de la souveraineté alimentaire, basée sur l'agroécologie (comme
décrit dans la Déclaration du Forum International sur l'Agroécologie de
Nyéléni de février 2015), des systèmes d'alimentation locaux, la
biodiversité, le contrôle de nos semences et le respect des cycles de
l'eau. Cette vision s'applique aux populations rurales, urbaines et
péri-urbaines et comprend des relations entre producteurs et
consommateurs basées sur la solidarité mutuelle et la coopération.
NOTRE SOLIDARITÉ SE BASE SUR LES CONVICTIONS ET LES PRINCIPES SUIVANTS,
QUI UNISSENT NOS COMBATS :
* les droits humains à l'eau, à l'alimentation et à la terre sont
fondamentaux et essentiels pour la vie. Toutes et tous, hommes et
femmes, adultes et enfants, riches ou pauvres, ruraux ou urbains doivent
pouvoir en jouir.
* L'eau et la terre sont non seulement des ressources naturelles
vitales, mais aussi une partie de notre héritage commun, dont la
sécurisation et la gouvernance doivent être préservées par chaque
communauté pour le bien commun de nos sociétés et de l'environnement,
aujourd'hui et pour les générations à venir.
* L'eau, la terre et les semences sont des biens communs, et pas des
marchandises.
* Le mandat légal et constitutionnel que nous reconnaissons à l'État
est celui de représenter l'intérêt des peuples. Raison pour laquelle
l'État a le devoir de s'opposer à toute politique ou traité
international qui menacent les droits humains et leur propre
souveraineté, y compris les mécanismes de règlement des différends entre
les entreprises et les Etats, tels que ceux inclus dans le Partenariat
transatlantique de commerce et d'investissement et la majorité des
traités d'investissement.
* Les politiques de gestion de la terre et de l'eau doivent favoriser
la réalisation de l'équité sociale, l'égalité de genre, la santé
publique et la justice environnementale.
* Le refus ferme de toute forme d'occupation et domination étrangères.
C'est pourquoi, ensemble, en tant que sociétés civiles venant des quatre
coins du monde,
NOUS NOUS ENGAGEONS À:
* sensibiliser, former et organiser les communautés en milieux urbains
et ruraux pour construire un mouvement fort et solidaire pour lutter
pour la reconnaissance et faire respecter nos droits humains à
l'alimentation, à l'eau et à la terre, et aux territoires ;
* défendre dans toutes les instances le droit des citoyen-ne-s et des
communautés au consentement préalable, libre et éclairé et la
participation pleine et entière dans la gouvernance des ressources
naturelles ;
* mettre en synergie les groupes de tous les secteurs engagés et en
lutte contre l'accaparement de l'eau et de la terre pour former des
plateformes nationales et régionales pour renforcer une convergence
internationale des luttes de la terre et de l'eau ;
* récupérer nos terres, eaux et semences ; récupérer les espaces
politiques légitimes pour lesquels nous nous sommes battu-e-s en tant
que détenteur/trices de droits, tels que le Comité de la sécurité
alimentaire et la nutrition mondiale ; et de résister à l'accaparement
de notre langage qui vise à soutenir des fausses solutions, telles que
l'agriculture intelligente pour le climat (climate smart agriculture) ;
* la solidarité avec et le soutien des défenseurs des droits humains
et ceux et celles qui s'opposent à l'accaparement des terres et de
l'eau, particulièrement lorsque ceux/celles-ci sont criminalisé-e-s ;
* nous opposer à toutes les politiques nationales et les traités
internationaux qui favorisent la privatisation et la marchandisation des
ressources naturelles et l'accaparement des terres et de l'eau, dont les
cartes pré-payées pour l'accès à l'eau, l'ajustement automatique du
tarif, et les Accords de Partenariat Économique (APE) entre UE et pays
ACP, aussi bien concernant les biens que les services ;
* dénoncer les classements du climat des affaires (doing business) de
la Banque mondiale et les systèmes de compensation pour la biodiversité
(biodiversity offsettings), qui ne s'appuient que sur le registre de la
spéculation, au détriment des critères de droits humains, sociaux et
environnementaux, et favorisent l'accaparement des terres et de l'eau.
NOUS REVENDIQUONS AUPRÈS DES INSTITUTIONS INTERNATIONALES, ÉTATS ET
AUTORITÉS LOCALES :
* de reconnaître l'indivisibilité des droits humains et leurs
obligations pour leur réalisation, particulièrement pour les groupes
vulnérables et marginalisés, les femmes et les jeunes. Ils doivent
appliquer de manière systématique l'approche des droits humains,
s'abstenir de violations, et prévenir et poursuivre les abus des droits
humains ;
* de mettre en place des politiques adéquates de réforme agraire, de
réforme foncière, de restitution réelle et de redistribution équitable
et de gestion durable de la terre, de l'eau et d'autres ressources
naturelles ;
* d'adopter des politiques, y compris des politiques de développement
et de coopération, qui visent l'autonomisation et la responsabilisation
des communautés au lieu d'être basées sur des intérêts économiques et
géopolitiques ;
* de respecter, protéger et réaliser le droit humain à l'eau et à
l'assainissement qui a été reconnu et explicité par la résolution de
l'Assemblée Générale des Nations Unies 69/2010, en adoptant les mesures
constitutionnelles et législatives garantissant à toutes et tous la
disponibilité et l'accessibilité à l'eau et aux services
d'assainissement, ainsi que la justiciabilité concrète du droit humain à
l'eau ;
* de reconnaître, respecter et protéger les droits collectifs
coutumiers sur l'accès, la sécurisation et la gouvernance du foncier, de
l'eau et des ressources naturelles, nos biens communs, en garantissant
les droits des femmes ;
* de respecter leurs obligations de ne pas reconnaître des situations
illégales, y compris particulièrement des actes prohibés commis par des
forces d'occupation, et de ne pas coopérer ou interagir avec des parties
prenantes impliquées dans des situations illégales ou qui en tirent
profit ;
* d'assurer le consentement libre, préalable et éclairé des
populations et la participation pleine et entière en ce qui concerne
toute décision relative à la gestion de la terre, de l'eau ou d'autres
ressources naturelles. De ne pas seulement entendre mais prendre en
compte nos revendications et notre droit de dire Non à l'accaparement
des terres et de l'eau ;
* de mettre en œuvre la Convention 169 de l'Organisation
Internationale du Travail relative aux peuples indigènes et tribaux et
la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples indigènes ;
* d'approuver explicitement la promotion des droits humains, dont les
droits humains à l'eau, à l'alimentation et à la terre, dans le cadre
des Objectifs de Développement Durable de l'Agenda ONU post-2015;
* d'appliquer immédiatement les Directives du CSA/FAO pour la
gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux
pêches et aux forêts et des Directives de la FAO visant à assurer la
durabilité de la pêche artisanale, en assurant notre participation en
tant que détenteurs de droits ;et de promulguer des lois nationales qui
garantissent pleinement la justiciabilité des dispositions de protection
des droits des personnes ;
* de soutenir et adopter la Déclaration des Nations Unies des Droits
des Paysan-ne-s et des autres personnes travaillant en milieu rural qui
est développée en ce moment au Conseil des Droits de l'Homme de l'ONU ;
* d'adopter et mettre en place un Traité contraignant pour prévenir et
punir les crimes des sociétés multinationales et d'autres entreprises ;
* d'adopter les mesures et les outils de droit international
pertinents, dans le cadre du Pacte International des Droits Économiques,
Sociaux et Culturels (PIDESC) des Nations Unies, afin de renforcer
concrètement le droit humain à l'eau et à l'assainissement, de clarifier
et spécifier les obligations des États, et d'empêcher toute forme
d'accaparement de l'eau.
Nous appelons les sociétés civiles, les mouvements sociaux et de base,
les ONGs et les syndicats du monde entier à s'investir dans cette
discussion et à renforcer cette déclaration et à soutenir ces
revendications avec tous les moyens à disposition. Ce n'est qu'en
solidarisant nos luttes, à partir de la protection de nos droits aux
ressources essentielles pour la vie, que nous pourrons faire entendre la
voix de la société civile dans les négociations vers l'adoption des
Objectif du Développement Durable post-2015, l'application des
directives internationales et régionales sur le foncier et les
ressources naturelles, et la COP 2015 pour arrêter le changement
climatique.
En poursuivant la construction de cette Convergence, nous reconnaissons
et apprécions notre diversité et les initiatives qui sont et seront
proposées, et sur lesquelles nous continuerons à débattre et discuter.
En vue de cela, nous nous engageons à diffuser largement cette
déclaration. Nous la partagerons avec nos communautés dans nos
territoires, afin de continuer à les impliquer dans le processus de
construction de cette Convergence.
_Eau et terre, mêmes dégâts même combat !_
Tunis, le 28 mars 2015.
Télécharger la declaration (pdf) ici [2]
Links:
------
[1]
http://viacampesina.org/fr/index.php/les-grands-ths-mainmenu-27/rrme-agra...
[2]
http://viacampesina.org/fr/images/stories/pdf/2015-04-Dakar%20to%20Tunis%...
9 years, 9 months
Déclaration de La Via Campesina sur la migration et les travailleurs ruraux
by La Vía Campesina
Déclaration de La Via Campesina sur la migration et les travailleurs
ruraux [1]
Créé le mercredi 1 avril 2015 19:41
25 MARS 2015 - FORUM SOCIAL MONDIAL TUNIS 2015
La migration des peuples à travers des barrières arbitraires est partie
intégrale de l'histoire de l'humanité. Motivés par la recherche de
meilleures conditions de vie, ces mouvements de populations d'un endroit
vers un autre ont été transformés plus tard en processus sociaux,
économiques et politiques qui ont largement bénéficié aux élites
dirigeantes - des marchands d'esclaves aux multinationales actuelles.
Aujourd'hui, le capital exige des libertés exceptionnelles pour lui même
-combinés avec de grandes restrictions pour les pauvres- qui engendrent
guerres, exclusion sociale, injustices économiques, crise climatique
globale qui forcent des milliers d'êtres humains à chercher un refuge au
delà des frontières internationales imposées.
Le capital financier et l'agrobusiness concentrent leurs pouvoirs et
leurs biens -diminuant les capacités de vie des petites fermes. En
générant la précarité, ils contraignent un nombre grandissant de la
population rurale à quitter leurs fermes pour migrer vers la ville.
Les politiques libérales, les accords de libre échange, le développement
de l'agriculture industrielle, la concentration des bassins de
production ont des effets destructeurs sur l'environnement, la
biodiversité, le climat et les économies locales, en particulier
paysannes.
Les communautés paysannes sont particulièrement affectées par ces
politiques agressives qui imposent un modèle de développement basé sur
l'exploitation des ressources, la captation des biens communs , le vol
des terres agricoles et l'exploitation des paysannes et des paysans
comme celle des femmes et des hommes travailleurs de la terre .
C'est ainsi qu'une forte proportion de paysans ruinés par ces politiques
se retrouvent parmi les centaines de milliers de personnes migrantes
dans le monde , obligés d'aller vendre leur force de travail loin de
chez eux.
Une fois urbanisés, nos peuples sont dans l'impossibilité de trouver des
opportunités dans nos pays et deviennent les migrants d'aujourd'hui, la
main d'œuvre pas chère au service des multinationales. Les cas les plus
révélateurs sont les paysans qui quittent les fermes familiales pour
devenir travailleurs low cost de l'agriculture des géants comme
Monsanto, Cargill, ou DuPont. Ceci arrive autant en interne - à
l'intérieur du Mexique ou de la Palestine par exemple- qu'en externe.
Nous traversons les frontières pour travailler pour ceux qui nous
forcent à quitter nos terres.
Nous la Via Campesina, le mouvement social le plus vaste, avec des
millions de paysans et paysannes, de femmes, de jeunes, de peuples
indigènes, d'afro-descendants, pêcheurs et -souvent dû à des
déplacements involontaires- des migrants et des travailleurs ruraux,
dénonçons le fait que, celles et ceux qui souffrent du changement
climatique qui provoque des dégâts catastrophiques dans nos territoires
sont ls plus pauvres d'entre nous. Le terme de "réfugié climatique" est
aujourd'hui utilisé pour décrire celles et ceux d'entres nous chassés de
leurs terres par les crises climatiques globales, par
l'industrialisation de l'alimentation et par un système social qui rend
coupable ses victimes et pardonne ses auteurs.
Pour faire avancer la lutte pour la Souveraineté Alimentaire et
permettre de mettre fin au contrôle des multinationales sur système
alimentaire global, nous déclarons qu'il est nécessaire de:
* Mettre fin à la violence et à la répression contre les migrants
victimes d'une soi-disant lutte contre le terrorisme. L'immigration doit
cesser d'être amalgamée avec les menaces contre la sécurité nationale
(ou domestique), car ce sont deux choses bien différentes.
* Que les émigrés sans papiers cessent d'être séparés de leurs
familles, car cela a de graves conséquences sur la vie de leurs enfants.
Il faut arrêter de confiner les enfants de migrants dans des centres de
détention qui les font vivre dans des conditions inhumaines, insalubres
et en violation de leurs droits les plus élémentaires. Il faut au même
titre stopper la déportation des enfants plus vulnérables.
* Que les réfugiés bénéficient de la protection des grandes
organisations internationales (comme l'ONU) et des ONG dont les valeurs
morales sont reconnues (comme Amnesty International), que leurs droits
soient garantis et que les campements de réfugiés soient mieux encadrés.
* Endiguer et révoquer les actions et les politiques qui criminalisent
les migrants et ne font qu'augmenter les cas de persécution, de
détention, d'expulsion et d'attaques physiques envers ces derniers. Il
faut forcer les Etats à respecter les conventions internationales, à
adhérer à la Convention pour la protection des droits des migrants et
leurs familles et à modifier leurs politiques et leurs interventions
publiques pour assurer la bonne exécution des conventions
sus-mentionnées.
* Légaliser la migration "clandestine" pour combattre la
criminalisation.
* Permettre (ou garantir) aux migrant-e-s l'accès au marché du travail
dans des conditions équivalentes aux travailleuses et travailleurs
"nationaux".
* S'opposer au travail temporaire, car ce système ne fait que diviser
la classe ouvrière et affaiblir ses luttes et son organisation interne.
Dans le cas des travailleurs agricoles temporaires (issus des programmes
"bracero" et "guest workers" ou embauchés dans leur pays d'origine), ils
ne profitent en réalité qu'à l'agriculture industrielle en lui
fournissant une main d'œuvre bon marché et docile.
* Mettre en place des réseaux actifs permettant l'organisation et la
défense des migrants, le renforcement du droit à la négociation
collective et du droit de grève, une solidarité permanente et enfin
l'adoption ferme et définitive du principe de "une attaque contre un est
une attaque contre tous"
* démanteler les conventions de libre échange, et surtout celles qui
ont un impact sur les ressources communes, les communautés rurales et
les peuples autochtones. Inscrire le principe de la souveraineté
alimentaire dans le droit international pour retirer au capital
corporatif le contrôle du système alimentaire et reconstruire nos
agricultures nourricières dans nos pays respectifs.
* combattre le système capitaliste de croissance économique et son
évolution "verte" qui ne touche en rien aux causes de la crise
climatique, qui elle-même exacerbe la crise des migrations. Parmi les
manifestations du chaos climatique, on peut citer: les grandes
sécheresses, les inondations, les avalanches, les séismes, les tsunamis,
etc. Ces catastrophes sont de plus en plus fréquentes et sont déjà
responsables d'un quart des migrations non-désirées à l'échelle mondiale
estimées à 210 millions de personnes (chiffre de l'Organisation
internationale pour les migrations,www.iom.int/cms/fr/sites.iom [2]).
* Reconnaître les causes de la crise climatique mondiale et forcer les
sociétés transnationales et leurs gouvernements dans les pays
industrialisés à assumer leur responsabilité dans la vague de réfugiés
climatiques. Au niveau national, intégrer les victimes de déplacements
du à la dégradation de l'environnement dans les stratégies de
développement social pour les aider à s'organiser.
* Élaborer des plans d'action avec des échéances précises dans les
politiques nationales de recherche et développement , en donnant la
priorité à l'agriculture paysanne durable comme une option viable pour
lutter contre la crise climatique et réduire les impacts des déplacement
dus à la dégradation de l'environnement.
* faire tomber tous les murs: Etats-Unis/Mexique, Melilla, Ceuta,
Palestine (Cisjordanie), Sahara occidental, etc., car non seulement ils
représentent une agression barbare contre l'humanité et ils divisent les
peuples, mais ils attentent à la nature. Les frontières géographiques
actuelles contribuent déjà fortement aux catastrophes écologiques et ces
murs ne font que les aggraver.
* Mettre fin aux guerres pour l'occupation de territoires,
l'extraction des richesses et l'asservissement des peuples autochtones
Nous sommes ici au Forum Social Mondial 2015 à Tunis pour faire savoir à
tout le monde, que ceci est notre engagement et que nous sommes prêts à
nous unifier avec tous les mouvements sociaux et populaires afin de
construire une alliance internationale de paysans, de travailleurs
migrants, de peuples indigènes et d'activistes pour un monde meilleur,
plus digne et plus humain.
Links:
------
[1]
http://viacampesina.org/fr/index.php/les-grands-ths-mainmenu-27/migration...
[2] http://www.iom.int/cms/fr/sites.iom
9 years, 9 months